Mes spontanéités (5)
Sous la pluie et tête baissée
je regarde l'eau glisser sur le faux pavé
et traverser mon corps rajeuni qui exulte.
L'eau fabuleuse des mes yeux amorce
son mouvement ascensionnel
car la vraie vie a tenu toutes ses promesses.
Fixant le cercle mystique en rotation
qui ne peut exister que dans mon vaste miroir d'immortalité
je ne ressens plus que du mépris pour la flèche qui se précipite.
Je me sens mourir quand le soleil amplifié
empêche toute velléité spirituelle de se mouvoir
et que la grimace conduit au rire sardonique.
Je me souviens des flaques d'eau sale
dans la cour où on conférait avec ces défunts
qui avaient la drôle d'habitude de se mettre à table.
Dans le brouillard jauni qui s'épaissit
je ne peux plus perdre mon âme
car les songes ont acquis la capacité de me faire survivre.
Je fais se multiplier les miroirs en cette nuit
car les mots incommensurables me donnent un pouvoir
que mon âme diminuée d'hier ne pouvait concevoir.
Marchant avec prudence sur le sol gelé des années passées
je poursuis mon parcours renversant
qui me mène au-delà des horizons caducs.
Je crois en moi sur la route en ligne droite
qui a le bonheur de devenir sempiternelle
m'encourageant à inventer la nouvelle aventure poétique.
La tête alourdie par le sommeil de la pensée
je tente de lever les yeux sur le jour assombri
par l'agonie qui a la cruauté de faire silence.
Les voix de l'avenir vont sans doute se lever
douces et souveraines et je sentirai se poser
sur mon épaule frêle le fantôme heureux d'un papillon.
Les doigts de la nature griffent mes paupières
dont les battements ralentissent maintenant
au fur et à mesure que le film ancien se déroule.
La source de la rivière ne peut plus être loin
car la lumière des êtres qu'elle contient renvoient l'image nouvelle
de la vie et de l'infini qui n'en est plus à ses balbutiements.